
Un cas à part : l'exemple de Mediapart
Mediapart est un site d'informations payantes, fonctionnant sans publicité, fondé en 2008 par Edwy Plenel : l'ancien rédacteur en chef du journal « Le Monde », François Bonnet, Gérard Desportes et Laurent Mauduit, tous trois journalistes et Marie-Hélène Smiéjan, qui a investi la même somme qu'Edwy Plenel.
L’accès à la page d’accueil du site est gratuit cependant la lecture des articles n'est rendue possible que par un abonnement payant soit, 1€ par mois pendant la période d'essai puis 90€ par an.

(Source du graphique : (*)
L'idée pour monétiser un contenu en ligne serait donc de vendre une information qu'on ne trouve nulle part ailleurs. Après des débuts difficiles, une série de scoops dans les affaires Karachi, Bettencourt ou encore Cahuzac a permis au « journal en ligne » de voir son nombre d'abonnés s'envoler. Le site en revendique aujourd'hui 47 000 à 9 euros par mois. En 2010, le site d'information comptait encore 1,35 million d'euros de pertes pour 3 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Suite à une conférence de presse tenue le 10 mars 2011, nous savons désormais que :
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Mediapart est rentable depuis septembre 2010.
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Le bilan de l'année 2010 est de : 4,4 millions d'euros de dépenses de 3 millions d'euros de recettes.
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95 % des revenus de Mediapart viennent des abonnements.
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20 % des abonnés sont des abonnés annuels à 90 euros
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Plus de 90 % des abonnés à 1 euro continuent après la période d'essai

(Source premier graphique : Source interne Mediapart ; Source du second : Awstats jusqu'en 2009 puis AT internet à partir de janvier 2010.)
D'après le site Rue89 (*) et l'Observatoire des subventions(*), Mediapart a, pour l'année 2009, reçu de l'État 200 000 euros de subventions, devenant ainsi, un des premiers site d'information en ligne à en bénéficier. (Voir « La crise de la presse : Le rôle de l’État »)
En août 2012, Edwy Plenel annonce que Mediapart compte 65 000 abonnés (*). En avril 2013, Mediapart en compte près de 75 000 (*), et le site en revendique 83 000 en janvier 2014(*).
Pourtant ces bons résultats ne sont pas entièrement suffisants pour s'autofinancer. En effet, Mediapart a lancé FrenchLeaks : un site « dédié à la diffusion de documents d’intérêt public concernant notamment, mais non exclusivement, la France et l’Europe », dans le but de diversifier ses sources de revenus. Le site publie aussi régulièrement des hors-série à travers ses cahiers trimestriels. Ainsi se pose la question de savoir si l'information en ligne est suffisante pour elle-même ou si elle doit être épaulée par d'autres ressources pour subsister.
Cependant, il n'en reste pas moins que les sites d'information en ligne fournissent souvent une information de niche et que tout financement, alternatif ou non, est appréciable pour le développement d'une information en ligne de qualité. En effet, ces derniers ne sont pas les seuls à se tourner vers des solutions alternatives, comme la convergence médiatique ou le crowdfunding (littéralement : « financement par les foules »), pour trouver de nouvelles ressources économique.
(Voir article "Vers une presse d'un nouveau genre : La convergence médiatique")
Une étude américaine montre également, qu'en 2010, les revenus publicitaires de la presse sur le Web ont dépassé ceux de la presse écrite avec 25,8 milliards de dollars, contre 22,8, une première dans l'histoire de la presse.
En France, malgré une part de marché en danger, la presse papier demeure le média préféré des annonceurs, qui y ont dépensé près de 3,7 milliards d'euros (− 1,6 %) en 2010. Les recettes publicitaires sur Internet présentent, elles, une hausse de 12 % la même année, avec 540 millions d'euros. (Voir « Les raisons de la crise : Le rôle de la publicité »
Le site d'information et d'opinion d'Edwy Plenel commence sa septième année d'existence avec « 8,8 millions d'euros de chiffre d'affaires et un résultat net de 1,4 million d'euros ». Une rentabilité de 16% qui valide le modèle économique nouveau : « le payant, sans publicité et sans subvention de l’État », explique t-il dans une interview consacrée au «Journal du net».(*) Mediapart compte aujourd'hui plus de 105 000 abonnés payants et une équipe de 54 collaborateurs en CDI.
Comment a-t-il réussi ce pari ? Par l'acquisition d'un public fidèle.
« Dans l'univers du numérique, on s'adresse à un public qui sait déjà beaucoup de choses : il entend, il a les réseaux sociaux, les radios, les chaînes d'infos en continue. Répéter et remouliner ce que tout le monde dit n'a pas d'intérêt. Pour nous, c'est fil d'infos, fil d'actualités et revue du web. En revanche, nos contenus doivent être exclusifs, doivent avoir de la plus-value, doivent apporter quelque chose que l'on n'a pas lu ailleurs. […] Les lecteurs de Mediapart viennent sur le bruit des scoops, des exclusivités […] et ils restent ensuite. Pourquoi ? Parce qu'ils trouvent de l'international, de la culture, de l'économie, des articles de fonds documentés mais qui par leurs angles, par leurs informations, par l'enquête, par le reportage, par l'analyse sont originaux, sont différents de ce qu'on trouve ailleurs. » Ainsi, reprend-t-il, Mediapart est « un laboratoire de recherche qui a testé des hypothèses et a montré qu'elles étaient valides . »